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Célestin Bedzigui : L’endettement préventif du Cameroun auprès du Fmi est un scandale

Posted by Admin on Nov 29th, 2009 and filed under Business. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0. You can leave a response or trackback to this entry

Dieudonné Gaïbaï | 29/11/09| Mutations

Celestin Bedzigui - courtesy Le quotidien Mutations

Celestin Bedzigui - courtesy Le quotidien Mutations

Dans la floraison des attractions de la ville de New York, l’immeuble Trump au 40 Wall Street, en est une. Bâtiment imposant au cœur de Manhattan, il dévoile son gigantisme dans un environnement où tout ou presque s’écrit dans la quête de l’excellence. Dans ces multiples compartiments de l’industrie des chiffres, Célestin Bedzigui, homme politique camerounais en exil depuis 2005, y a ses bureaux. Intégré dans les méandres de la haute finance en sa qualité de Financial Adviser à Prudential (une société financière et d’investissement), il est aussi le directeur général de Global Rating Services, une agence de notation de risque pays. Dans l’une des multiples salles de conférences de l’immeuble Trump et d’aussi loin, Célestin Bedzigui passe en revue l’actualité récente du Cameroun.

Comment le politique que vous êtes, en est arrivé à se trouver une place ici à la “Mecque de la haute finance”?
Au début de mon exil ici aux Etats Unis, j’ai d’ abord travaillé pour une société de Consulting. Mais mon objectif était d’entrer dans l’industrie de la Haute Finance. Parce que c’est tout de même là où se créé la richesse. J’y suis entré en devenant Financial Adviser avec Prudential Financial qui est l’un des majors de la finance aux Etats Unis. Je me suis rendu compte de ce que c’est l’initiative entrepreneuriale qui est la clé de la réussite dans ce pays ou la seule entreprise publique est la poste, toutes les autres entités économiques étant d’initiatives entrepreneuriales individuelles, même si l’Etat n’hésite pas a intervenir par la suite lorsqu’ il le faut pour décider du sort de certaines entreprises comme cela s’est vu au quatrième trimestre 2008 au plus fort de la crise financière.
C’est ce qui m’a encouragé dans mon”rêve fou” à créer moi aussi une entreprise dans les ”Financial Services” où j’avais déjà un pied par Prudential. C’est ainsi que j’ai établi une agence de notation financière et économique spécialisée aux pays dit du ”MenA and Ssa”, entendez “Middle East-North Africa and Sub-Saharian Africa”, Moyen Orient- Afrique du Nord et Afrique Subsaharienne.

Pourquoi avez-vous choisi ce créneau?
J’ai parlé d’un ”rêve fou” que j’ai nourri depuis des années, celui un jour de diriger une entreprise de services financiers a Wall Street. J’avais élaboré un modèle d’évaluation du risque-pays et m’intéressait beaucoup a la problématique du risque d’investissement dans les pays émergents. Déjà du temps ou j’étais a Hec. Paris au début des années 80, j’avais rédigé un mémoire en Finances sur le risque-pays et le risque international en prolongement de recherches que j’avais entamées auparavant lorsque j’étais étudiant en troisième cycle d’économétrie, prévision et prospective à l’Université de Paris Dauphine sur les phénomènes de ruptures sociopolitiques et économiques dans les pays en développement. Vous voyez, c’est donc de racines très profondes.

Qu’est-ce qui justifiait un intérêt aussi marqué?
Comme je l’ai dit plus haut, je me suis en fait rendu compte que les grandes agences de rating ne s’intéressaient pas beaucoup aux économies et produits financiers de nos pays, de manière à les rendre plus visibles et lisibles pour les Funds Managers, alors même que la part d’argent qui s’investit dans ce qu’on appelle les ”Global Funds” va croissant. Aujourd’ hui à certains égards, il s’avère aussi risqué d’investir aux Etats-Unis que d’aller investir au Nigeria. Mais seulement, il y a une information asymétrique telle que les entreprises et produits financiers américains sont plus lisibles et visibles pour les Funds managers qui sont de ce fait plus enclin a y jeter leur dévolu, malgré le fait que l’économie des Etats-Unis a été très profondément ébranlée et près de s’effondrer, n’eut été la vigueur et la robustesse économique du leadership du président Barack Obama.
Ce que ces grandes agences de notation font pour les économies occidentales, moi je me destine à le faire pour les économies d’Afrique et du Moyen Orient. Exploitant un modèle à base économétrique et tirant profit des connaissances additionnelles que j’ai acquises ici, j’ai mis sur pied cette agence de notation le 27 juin 2008, date d’incorporation de Global Rating Services dans l’Etat de New York.

Mais vous êtes encore dans l’anonymat…
Notre activité ne relève pas du grand public. C’est une niche dont la clientèle est très spécialisée et s’approche sur une base personnalisée et directe. C’est avec le temps que la qualité de notre service nous exposera et nous imposera à la notoriété d’un public lui-même avisé. Dans l’avenir, il viendra un temps où le besoin d’une promotion institutionnelle se fera sentir, alors, nos aviserons.

Et par quels moyens croyez-vous avoir un impact sur les pays d’Afrique et du Moyen-Orient?
Nous travaillons en ce moment à établir des plates-formes d’analyse au Cameroun, en Afrique du Sud et au Moyen Orient. Et nous avons des services ”credits” et ”non-credits”, les ”credits” étant tout ce qui a un soubassement financier et les ”non-credits” portant sur ce qui n’en a pas un. Il y a un troisième volet que nous sommes en train d’approfondir et qui vise a faire connaitre aux décideurs de chez nous sur l’importance de la notation pour qui veux avoir accès a l’ immense source de capitaux que sont les marchés financiers internationaux. Nos municipalités par exemple devraient pouvoir financer un grand nombre de leurs infrastructures par exemple en se donnant les moyens de lever de l’argent en émettant des obligations appelés ici ”bonds” sur les marches financiers, en d’ autre terme là ou l’argent se trouve en quantité quasi- illimitée.
Il est absolument vital et urgent de sortir nos pays du ghetto financier et mental dans lequel les enferment les ”costumards incompétents” du FMI et de la Banque mondiale en les entretenant dans une logique stérile et débilitante d’assistanat. Ces organismes nous font croire qu’ils sont l’unique source auprès de laquelle on peut trouver des ressources financières. Cela est faux. Comparés aux marchés financiers globaux, ces organismes sont pauvres et masquent ce fait avec la feuille de vigne des considérations du type conditionnalités, aides, plutôt que de nous laisser travailler avec nos énergies mentales propres aux critères de rigueur qui nous ouvriraient grandes les portes d’accès a ces marchés. Les pays d’Europe de l’Est étaient il y a quelques années encore logés a une enseigne semblable a celle de nos pays.
En deux décennies, la plupart ont réussi par leur énergie endogène à transformer leur environnement et système économiques, a y faire prévaloir les critères d’efficacité et de fiabilité au point d’être aujourd’hui des destinations privilégiées d’investissements massifs. Et qui dit fiabilité dit notation. Ce sont la les nouveaux leviers et outils autant du dynamisme que de l’efficacité économique, pas les rengaines stériles, soporifiques et sans fins du genre Pas, Ppte dans lesquels un pays comme le notre est entretenu et bercé depuis plus de deux décennies par le Fmi et la Banque mondiale, sans en vue une sortie du tunnel, vous imaginez? Comparez cette durée a celle de six mois qu’il a fallu a Obama pour arrêter la descente aux enfers d’une économie américaine qui était o combien plus profondément ébranlé!
La bourse au Cameroun par exemple ne peut pas marcher à cause de l’absence d’un outil comme celui du rating des sociétés cotées, insuffisance venant s’ajouter a l’ handicap d’avoir une économie ou la logique patrimoniale prévaut encore sur la logique financière. Qu’est-ce qui va fonder la décision du décideur à acheter des actions d’une société à la côte. C’est pour ça que vous observez que cette bourse ne décolle pas. C’est ainsi qu’est gaspillé un outil pourtant précieux qui sous d’autres cieux est une arme de conquête de la prospérité économique. C’est absolument dramatique!

D’où vous sont venues les ressources pour mettre sur pied cette agence de notation?
On n’a pas besoin d’énormément d’argent pour établir une entreprise de service.

Même pour vous installer à Wall Street?
C’est une entreprise à forte intensité intellectuelle. On n’a besoin d’équipements lourds et autres infrastructures. En plus du capital intellectuel que représente notre expertise, il faut avoir l’aptitude a attirer des esprits brillants et travailleurs et a développer une bonne politique de marketing pour se faire connaître et attirer les clients. Pour le reste, quand on arrive dans ce pays et qu’on montre qu’on peut vous faire confiance, on a accès aux lignes de crédit pour financer les charges courantes.

Ça fait quatre ans que vous êtes parti du Cameroun, comment est-ce que vous percevez la situation de l’infrastructure économique de votre pays?
Evidement ça a changé, mais en pire. Parce qu’un certain nombre de perspectives qui étaient prometteuses en matière de relance économique se sont avérées décevantes. Je pense notamment à tout ce qui a été dit par rapport à l’atteinte du point d’achèvement par le Cameroun et qui devait libérer des ressources importantes, lesquelles ressources qui, orientées vers l’investissement, devaient booster le taux de croissance. Aujourd’hui, on constate que nous avons un taux de croissance inférieur à celui des années 1980 et qui demeure à un niveau dérisoire par rapport aux exigences de la relance économique. Avant l’atteinte de ce point d’achèvement, le taux de croissance oscillait entre 2 et 3%. Vous savez que le taux moyen d’augmentation de la population du Cameroun se situe aux alentour de 3, 5%. On se retrouve en réalité avec des taux de croissance réel négatif. On nous avait fait penser qu’avec les ressources qui seraient libérées après l’abandon de 80% de notre dette extérieure, on pouvait atteindre des taux de croissance de l’ordre de 8 ou 9%, sinon pourquoi pas à un taux de croissance à deux chiffres.
Malheureusement si vous regardez les prévisions du Fmi et de la Beac, le taux de croissance du Cameroun pour l’année en cours n’est pas attendu pour être supérieur à 3 %. Ce qui est catastrophique. Parce qu’alors pendant ce temps, les jeunes qui arrivent sur le marché du travail sont de plus en plus nombreux. La relance économique n’étant pas conséquente, le taux de chômage va croissant. Or, on sait bien que pour qu’on arrive ne fut-ce qu’à une stabilisation du taux de chômage, il faut qu’on ait des taux de croissance égal ou supérieur à 4%. Et nous en sommes loin.

Qu’est-ce qui soutend selon vous cette “déchéance” de l’infrastructure économique du Cameroun?
C’est l’incompétence du Gouvernement, c’est clair, net, et définitif. Parce que, lorsqu’on prévoyait que ces ressources seront libérées, quels sont les plans qui ont été élaborés dans les différents secteurs d’activités et les différentes régions pour une utilisation judicieuse susceptible d’avoir un effet multiplicateur sur l’économie. Aucun!

On vous parlera des nombreux documents de stratégies rédigées ici et là?
Le document stratégique de réduction de la pauvreté (Dsrp) dont vous parlez était un outil qui visait à arrêter la dégradation du niveau de vie des populations par la satisfaction de leurs besoins de base. Ce qui ne peut en aucune manière être confondu avec une politique de relance économique dont le pays avait besoin. Depuis environ vingt ans, une certaine paresse politique fait qu’ il n’a jamais été élaboré, de manière expresse et formelle, ni une politique de relance, qu’elle se situe dans une perspective de relance par l’investissement ou de relance par la consommation, ni une politique industrielle dont le premier effet aurait donné lieu à un Code d’investissement, depuis que l’ application du précédent a été suspendu par les apprentis sorciers de du Fmi et la Banque Mondiale, ni une politique de développement économique régional.
Donc parlant de la politique économique du Gouvernement depuis des années, on ne voit rien de précis, tout s’étant dilué dans les intrigues et guerres des chapelles gouvernementales, les arrangements maffieux sous la table avec des partenaires douteux, la préservation sourcilleuse des intérêts néo-coloniaux de la françafrique, les lourdeurs et blocages administratifs entretenus par les esprits étriqués et bureaucratiques des fonctionnaires avides de pots de vin. Et les chiffres eux sont là pour rendre compte d’une triste vérité, celle des résultats catastrophiques produits par ces pratiques qui ne sauraient en tout cas pas tenir lieu de politique économique. Et vous le savez les chiffres sont les oracles des temps modernes: A 3% de taux de croissance, le marasme économique continue d’être le lot de notre pays et de ses populations, depuis 20 ans! Y pensez-vous? Comprenez donc que je pointe du doigt la compétence de ceux qui gouvernent depuis tant d’années…

Aujourd’hui le Cameroun a repris les chemins de l’endettement avec cet emprunt auprès du Fmi, précédé par un propos controversé du ministre des finances. Cela est-il judicieux à votre sens?
(Rires) Le Ministre des Finances est une personnalité que je connais pour être ce qu’on appelle un “honnête homme”. Et, je m’en voudrais de lui causer du tort en émettant un jugement à la légère. (Hésitations). Au demeurant au Cameroun, celui qu’on appelle Ministre des Finances est en réalité un simple comptable. Ce n’est pas le comptable qui prend la décision d’endetter, c’est le Directeur General, ce qui ici correspondrait au Président de la République ou a la rigueur au Premier Ministre. Si aujourd’hui il faut qu’on s’interroge sur la responsabilité de cette dette autant dérisoire que ridicule, je tournerai mon regard vers le Président et le Premier Ministre.
Ceci dit, comme tout le monde, je me dois de relever le caractère plutôt curieux de sa justification de cet acte, reconnaissait lui-même au passage le montant dérisoire et dont le caractère inutile du dit endettement. On l’aura ainsi entendu en chorus avec la Résidente du Fmi faire état d’un concept absolument inconnu en économie: “L’endettement préventif’”! Ce concept n’existe pas et est au demeurant nocif. Tout d’ abord toute dette se paie un jour. Nous ne pouvons pas a la légère alourdir la charge de la dette que payeront nos enfants et petits- enfants juste parce qu’on veut de l’argent pour régler la facture des consommations courantes. Et ensuite un endettement se traduit toujours par une modification de la base sur laquelle les investisseurs éventuels jugent la crédibilité d’un pays. On ne joue pas avec ca comme de se mettre quelque billets de banque dans la poche pour la sortie du Samedi soir, au cas où…

On vous fera le reproche d’être critique de l’extérieur?
Il y a au Cameroun une grave tendance à persécuter, marginaliser et clochardiser toute intelligence qui contredit le système. On a ainsi vu beaucoup des esprits brillants être acculés à la mort sociale et parfois physique. Je me souviens de ce que les dernières années, j’étais Consultant auprès des agences des Nations Unies, jusqu’ au jour ou après une mission que j’ai effectuée avec Monsieur Dakayi Kamga, Madame de Mobray, Représentante résidente du Pnud, s’est vu tancer par le Ministre de l’ Economie de l’époque dans les termes: ”N’y a-t-il qu’aux opposants que vous pouvez confier vos missions?” (Sic). Et lorsque par ailleurs j’ai été sélectionné pour mener une Etude Prospective sur le Cameroun a l’horizon 2025, étude financée par le programme ”Futures Africains” du Pnud dirigé par Alioune Sall, ce même Ministre a préféré bloquer l’exécution de la mission jusqu’à la clôture du programme. L’économiste en chef au bureau local du Pnud peut vous en dire un mot.
Voulez-vous que je fasse partie de la caravane de ceux qui n’ont pas survécu à ces persécutions pour que vous me reconnaissiez quelque mérite?
Aujourd’hui d’ici, a la position où je suis, je crois apporter une certaine manière de lire les choses qui n’est pas essentiellement négative. Je me préoccupe d’analyser, de tirer la sonnette d’alarme, de tenir éveillée la conscience des Camerounais. Peut-être que le moment venu, je parlerai a mes compatriotes pour leur proposer une vision et une plateforme d’un Cameroun régénéré, sur la foi de la vingtaine d’années que j’ai déjà passé à penser et a défendre les valeurs fondamentales de la République que sont la Démocratie et la Justice. Mais nous n’ y sommes pas, la saison semblant être aux chrysalides prenant leur premier envol de papillon.

Mais n’est-ce pas là aussi le rôle de l’opposition, celui d’éduquer les masses?
Je pense que vous cédez à cette facilité très camerounaise de faire des leaders de l’opposition les responsables de l’apathie du peuple camerounais. Vous occultez au passage l’essentiel: c’est la reconnaissance par le public du mérite qu’ont tout ceux qui a un moment ou a autre se sont levés, ont parlé, marché contre ce régime,à leur corps défendant. Lorsque nous avons été sur le terrain et que nous avons eu à affronter le Rdpc généralement les mains nues, où étaient les Camerounais? Dans les caravanes du Rdpc. Où étaient les jeunes pour venir grossir nos rangs? Beaucoup se retrouvaient dans les charters électoraux du Parti au pouvoir… Nous nous retrouvions a sillonner les villages, avec quelques paysans et quelques jeunes qui nous suivaient. Les Camerounais pendant ce temps étaient avec le Rdpc, dans les salons des ministres, des dignitaires du pouvoir, aux vérandas des élites, a attendre une bière. Aujourd’ hui, lorsque je m’entends dire que j’ai déserté le terrain, je trouve cela amusant.
Et jusqu’aujourd’hui, on est en droit de se demander où est le peuple? Si aujourd’hui vous demandez aux populations de se rassembler au carrefour de la Poste Centrale ²à Yaoundé pour protester contre l’imposture qu’est Elecam, vous ne compterez pas plus d’une dizaine de personnes. Il y a quatre ans, en 2004, à la veille de l’élection présidentielle, nous pensions qu’en commençant nos manifestations pour réclamer l’informatisation du fichier électoral au Marché Central de Yaounde, les populations comprenant que nous nous battions pour leur intérêt se joindraient a nous. Nous prenions le risque de nous faire tabasser afin qu’ils jouissent de leurs droits citoyens, les gens riaient de nous… Nous étions pourtant là, dans la Coalition, avec tout ce que le Cameroun compte comme crème de l’opposition. Le général Charles De Gaulle a eu un jour ce mot qualifiant ses compatriotes: ”Les Français sont des veaux”… Les Camerounais seraient-ils des veaux, c’est-à-dire des personnes qui sont incapables de se battre pour leur destin, qui préfèrent en décharger la responsabilité sur les épaules de ceux là a qui ils n’apportent même pas leur soutien, alors même que certains de ceux là ont mis leur vie en ligne en s’élevant contre ce régime?

Votre combat ainsi que celui de vos camarades a donc été vain?
Notre lutte n’a pas été menée en vain. Les libertés dont les Camerounais jouissent aujourd’hui sont le résultat des efforts et de la pression exercés contre le régime par l’opposition. Par essence le régime de Biya est dictatorial et totalitaire; il n’aurait rien concédé sans pression. La preuve est sa manie d’essayer de reprendre le lendemain ce qu’aujourd’hui il a cédé sous la pression. Par exemple les réunions publiques prévues pour être soumises au régime de déclaration se voient ramener subrepticement au régime d’autorisation par les sous-préfets… On peut dire aujourd’hui que les Camerounais ont déserté les rangs de la lutte patriotique. Ils ne veulent plus se mobiliser pour leurs droits. Au contraire, ils se mobilisent derrière Biya.
Je vous donne un exemple qui va vous donner la mesure du drame camerounais. On peut penser qu’être dans la diaspora libère de l’esprit d’asservissement au régime de Biya et de la vénalité. Lorsque M. Biya vient ici à New York, il y a deux camps qui sont généralement observés. Il y a celui là constitué par des gens qui vont aller remplir les salons de l’ambassadeur du Cameroun ou se mettre en rang pour recevoir un petit billet de 50 ou 100$. Ils sont des centaines. Il y a aussi ceux là qui dénoncent le séjour de Biya en terre de liberté ici en Amérique et qui prennent la décision de manifester. Mon ami Jean Pierre Kamwa du Cameroon Action Movement de New York s’est ainsi retrouvé seul, porteur d’une pancarte devant le Waldorf Astoria, pendant que les dizaines de Camerounais venus acclamer Biya et espérant être recrutés comme chauffeur par la délégation camerounaise lui demandaient qu’est ce qu’ il faisait la! Vous voyez ce drame là. Des gens qui pour 50$ se croient obligés de trahir jusqu’ a leur dignité, et qui croient ensuite se défouler la conscience en se livrant a des procès en sorcellerie ”contre l’opposition”!
Cet exemple est l’illustration grossissante de l’état d’affaissement de l’esprit patriotique camerounais. C’est des choses sur lesquelles le Peuple doit pleurer et se ressaisir.

Mais c’est davantage la posture de cette opposition prête à aller à table qui est condamnée par ce peuple là. Si on prend simplement le cas de votre camarade de parti devenu aujourd’hui ministre de la Communication…vous y trouvez les motifs d’espoir du peuple camerounais?
Je ne vois pas pourquoi, le choix d’un individu peut amener à disqualifier le combat de toute l’opposition. Cela ne saurait remettre en cause ni le mérite du combat mené par ceux qui sont opposés au système actuel, ni le fait qu’au moment où les camerounais doivent se mobiliser pour sortir du gouffre où ils s’enfoncent jour après jour, ils doivent le faire, plutôt que de se masturber dans des critiques contre l’opposition. Si le peuple était aussi sévère avec le Président Biya qu’il l’est avec les dirigeants de l’opposition et se mobilisait en conséquence, le problème du Cameroun aurait longtemps été résolu.

Donc vous approuvez la démarche de M. Tchiroma?
Définitivement non! Je déplore qu’ Issa qui a été un compagnon de lutte et un ami aie fait ce choix. S’il m’avait demandé mon avis, je le lui aurais déconseillé, d’autant plus que maintenant on lui confie le rôle qui tient à la fois de Goebbels et Jdanov, les Ministres de la communication de Hitler et de Staline, avec pour mission la propagande du régime et la répression de la presse… N’est-il pas tout simplement à plaindre? Mais peut-être faut-il rechercher les raisons de son attitude dans une manière de règlement de compte ou dans une espèce de compétition qui s’est établi entre lui et M. Bouba Bello Maïgari, d’être au Gouvernement. Ça peut se lire ainsi. Peut-être c’est tout aussi simplement, le signe de l’abandon du combat d’hier. A ce niveau, chacun est placé devant sa conscience et devant le jugement du peuple.

Vous pourriez donc au nom de ces considérations là, entrer au gouvernement au Cameroun?
Alors je vous le dis et vous pouvez l’écrire en lettres majuscules, ”Absolument jamais”! Je ne peux et ne pourrai accepter de faire partie ni du système de Biya, ni d’un gouvernement dont Biya serait le Chef, car il s’agit d’un esprit qui est à l’œuvre et donc les manifestations et les œuvres sont à l’opposé de mes convictions tant politiques que morales. Je ne peux en aucune manière et sous aucun prétexte le faire. Considérez cela comme une posture définitive. J’investis plutôt ce que j’ai comme énergie physique, mentale, intellectuelle, spirituelle à organiser la dynamique qui libèrera notre pays du fléau sous lequel il ploie depuis tant d’années. Vous en saurez plus tard.

Vous avez quand même des contacts avec M. Bello Bouba, votre président national à l’époque?
Je garde du respect pour le président Bello Bouba. On ne peut pas avoir cheminé ensemble à des moments aussi critiques dans la politique dans notre pays pour s’ignorer ou se détester. Certaines émotions sont d’un ordre inferieur. Nous étions ”presque amis”. Même si la politique nous a mis sur des voies divergentes, nous restons après tout citoyens camerounais.

Entretien mené par Dieudonné Gaïbaï, à New York

1 Response for “Célestin Bedzigui : L’endettement préventif du Cameroun auprès du Fmi est un scandale”

  1. Pat says:

    WOW very interesting.

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