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Yaoundé : Les « sauveteurs » attendent toujours le recasement

Posted by Admin on Oct 1st, 2010 and filed under Business. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0. You can leave a response or trackback to this entry

Délogés des marchés Central et Mokolo il y a un an, ils attendent toujours leur installation sur de nouveaux sites.

En septembre 2009, les commerçants installés à l’Avenue Kennedy, ceux occupant les abords du marché Central et ceux du marché de Mokolo avaient été déguerpis par les agents de la Communauté urbaine de Yaoundé (Cuy).

Il leur était reproché d’être installés sur la voie publique. Lors des descentes des policiers municipaux sur le terrain,  plusieurs vendeurs à la sauvette et des commerçants avaient vu leurs marchandises saisies. L’association nationale des opérateurs du secteur informel pour la lutte contre la pauvreté au Cameroun (Anosilp) avait introduit des propositions de sites de recasement auprès de la Communauté urbaine de Yaoundé. Ces requêtes sont restées vaines. Selon Moussa Yimga, de l’Anosilp, « près de 7200 personnes ont perdu leurs marchandises durant ce mois- là à Mokolo, n’ajoutons même pas ceux du marché central ».

Au cours d’une réunion organisée le 7 avril 2009, l’ex- Premier ministre Enoni Ephraim avait demandé au délégué du gouvernement de Yaoundé de concilier la nécessaire discipline urbaine à la conduite sereine des activités commerciales. Enoni Ephraim avait par ailleurs insisté sur l’impérieux devoir de sensibilisation et d’information qui doit sous tendre toute action publique, à l’effet de rechercher l’adhésion et la collaboration de tous. Malgré plusieurs actes de revendications des commerçants chassés, notamment des lettres adressées aux membres du gouvernement, dont l’ex- Premier ministre Enoni Ephraim, les déguerpissements se sont poursuivis avec confiscations des marchandises.

Un problème persistant
Un an après, la situation des « sauveteurs »  n’a pas changé. Ils attendent toujours des sites de recasements. Entre-temps, ils continuent de jouer au chat et à la souris avec la Cuy pour survivre. Plusieurs disent avoir fait faillite. Selon le recensement de l’Anosilp, près de 500 millions de Fcfa en marchandises ont été perdues au cours de toutes ces tracasseries. Une inactivité prolongée qui a suscité diverses conséquences dans leur entourage notamment des séparations de couples, la non-scolarisation des enfants, le surendettement et même des décès. Dès le mois d’octobre 2009, le site de recasement de la foire promotionnelle de Tsinga leur a été attribué. Mais, il s’est révélé étroit au regard de leur grand nombre. Depuis 2010, la Cuy a lancé plusieurs chantiers de construction de boutiques dans la ville. Celles-ci ne sont pas affectées prioritairement aux « sauveteurs », dénoncent-ils. Sur près de 1500 boutiques construites dans la ville, ils disent n’avoir eu aucune. La Cuy pour sa part déclare que les boutiques ont été construites par des concessionnaires qui louent comme bon leur semble. L’aménagement du « village des jeunes » sur 9 hectares à Etetak et Mvog-Betsi est en cours, de nouvelles boutiques.

Muriel Edjo|1er Octobre 2010|Le Jour|

réactions

aristide momo, fripier, marché de mokolo «Rien n’a été fait pour notre recasement »
Ça fait un an que nous sommes ballottés par les autorités. Rien n’a été fait pour notre recasement. En plus de cela, il faut même évoquer le dédommagement. Nos marchandises nous ont été arrachées plusieurs fois et n’ont pas été remises. Lorsqu’on déloge des gens, il faut trouver où les envoyer. On ne peut pas nous dire, ne faites pas ceci sans nous dire quoi faire exactement. La Cuy voulait qu’on rentre au quartier alors que nous avons des charges. J’ai perdu plus de 5 millions de Fcfa en marchandises lors de toutes ces opérations. Maintenant que je suis réduit à néant, que je souffre, l’objectif des autorités est-elle atteinte ?  Nous voir mourir alors que notre seul objectif est de combattre la pauvreté de manière noble. Sans voler ou causer de préjudices à quiconque.

djikaya marius, ex-vendeur de cosmétiques, marché central
« Nous demandons un espace»

Nous attendons toujours les sites de recasement. Partout, des boutiques sont construites et avant même qu’elles ne soient terminées, elles sont déjà prises. Les concessionnaires ne veulent  même pas entendre parler de nous. Et les personnes qui viennent louer ces boutiques ne vont même pas les utiliser, elles vont les sous-louer au prix fort. Entre-temps, nous mourons de misère. On nous réprime si nous voulons trouver un moyen de nous en sortir. Nous payons des taxes, nous contribuons au développement du pays et c’est comme ça qu’on nous traite ? Nous sommes dans le secteur qui recrute le plus au Cameroun et le gouvernement ne fait rien pour que nous soyons à l’aise. Nous demandons de nouveau un espace où nous pourrons accueillir nos clients. Nous avions même proposé de contribuer pour le construire mais que l’on nous indique seulement où le faire. Pourquoi ne pas nous répondre, c’est de la pure méchanceté.

salomon baya, ex-libraire d’occasion, marché central « Je suis surendetté »
La rentrée scolaire a été pénible pour moi, j’ai dû m’endetter et je ne sais pas encore comment je vais rembourser. Le plus urgent était que les enfants aillent à l’école. Trouver un emploi pour mettre de quoi manger sur la table chaque jour est difficile. Avec ma petite marchandise, je pouvais rentrer à la maison avec un peu de sou. Tout a été confisqué. Je vous assure que je suis surendetté. Nous avons attendu le recasement dans l’espoir de nous refaire une santé financière, nous avons même fait des sacrifices en empruntant de nouveau de l’argent pour louer les boutiques qui étaient construites. Mais, nous n’avons même pas été prioritaires lors de leur attribution. Les concessionnaires de la Cuy ne sont même pas des Camerounais, ils font leurs affaires sur notre sang.  Même la Cuy qui pouvait faire du social en nous aidant s’en fiche.

aimé sockeng, fripier, marché de mokolo « Il y a des magouilles dans cette affaire »
J’ai abandonné l’espoir de voir notre problème se résoudre un jour. Je me dis qu’il y a des magouilles dans cette affaire et que notre situation arrange les affaires de ceux-là qui profitent de l’argent généré par les boutiques construites un peu partout. Sinon comment expliquer que depuis une année, tout un gouvernement n’a pas trouvé de solution aux problèmes de milliers de Camerounais qui cherchent leur pain quotidien à la sueur de leur front. C’est comme si la Cuy ne veut pas simplement nous voir où que ce soit. Si nous acceptons de rester à la maison, nous offrira-t-on des emplois pour remplacer ceux qu’on nous force à abandonner ? Nous ne jouons pas aux récalcitrants avec l’autorité, l’autorité ne veut pas nous comprendre et veut nous forcer à aller dans un sens qui n’est bénéfique qu’à un camp. Nos vies en dépendent, l’avenir de nos enfants aussi, nous ne pouvons pas marcher comme des moutons alors qu’aucune solution ne nous apparaît.

Muriel Edjo|Vendredi, 01 Octobre 2010|Le Jour|


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