Sous le chapiteau : Calixthe Beyala décortique Manu Dibango

Parfait Tabapsi| Lundi 31 Mai 2010 | Mutations|

L’écrivaine a expliqué hier les conditions d’accomplissement de son documentaire.

Pour les jeunes Camerounais qui ne la connaissaient pas jusque là, la conférence de presse d’hier au village du festival a permis de se faire une idée de cette grande gueule du landerneau littéraire parisien. Celle dont la présence se justifie à Yaoundé par le film qu’elle a proposé et qui revient sur l’histoire de son compatriote saxophoniste Manu Dibango. Une rencontre qui restera dans les mémoires peut-être mais dont certains aspects de la réalisation restent encore discutables.

Il en est ainsi du principal responsable du film. Devant les journalistes hier, elle a refusé d’en indiquer l’identité tout en affirmant qu’elle en est l’auteur et qu’elle a du recourir aux services de “techniciens” pour donner corps à son idée. Dans la prolixité qui la caractérise, elle a jeté un regard sur le cinéma africain et fait savoir les motivations qui lui avaient fait changer de fusil d’épaule pour ce nouveau projet.

Pour elle “Manu Dibango” fut une belle aventure qui lui a permis avec le prétexte de son héros de repartir sur le chemin parcouru par le continent qui l’a vu naître et grandir durant ces 50 dernières années.

Une aventure qui puise sa racine dans une opportunité offerte par France Télévisions aux fins de permettre aux Africains d’exprimer leur regard de l’histoire de ces 50 dernières années. Elle a choisi pour cela un homme dont l’histoire et le parcours traversent tout le continent et qui, a-t-elle fait savoir, a été ému aux larmes à la fin du projet. Une émotion dont le public de Yaoundé n’a pas bénéficiée à la première projection vendredi dernier au Palais des Congrès.

Aux critiques, elle a dit que son film n’était point une “comédie musicale car il ne fallait pas enfermer Manu dans sa seule dimension musicale. Je voulais qu’on le voit dans les autres identités qui le composent”. Une envie qui a aussi servi de prétexte pour dire combien il était important pour un intellectuel d’épouser les grandes causes de son temps plutôt que rester impassible alors même que le chaos guette.

Avec pour résultat un film que beaucoup à la conférence ont salué, réalisateurs et critiques compris. Et à tous ces admirateurs d’un dimanche, elle a tenu à faire savoir qu’elle restait “toujours passionné par l’univers romanesque où il y a plus de liberté parce que l’écrivain travaille en solitaire”. Un signal donc qui présage de ce qu’on pourrait bientôt voir celle qui est quand même Grand prix de l’académie française en librairie. Mais avant, elle a tenu à dire que “les gouvernements africains n’ont pas vu l’importance de la culture jusqu’ici. Pour eux, nous ne sommes que des saltimbanques, voire des ennemis”. Pis, nombre de riches persistent à accumuler fortune et à négliger la littérature et son corollaire qui est l’imagination. A ceux-là, elle voudrait faire comprendre que “la lecture est vecteur de l’imaginaire. Et sans imaginaire, un peuple est mort”.