Affaire Abono Paulin: Un Hollandais entendu par la gendarmerie

Par jean.francois.channon | Mardi 6 avril 2010 | Le Messager

La cinquantaine bien sonnée, il s’appelle Peter Lock. Cet homme de nationalité néerlandaise séjourne au Cameroun depuis quelques semaines. Le motif de son voyage au pays de Paul Biya est lié à la célébration de son mariage civil avec une jeune et charmante fille de la tribu Mvon Mvon de Yokadouma. Arrivé donc au Cameroun il y a quelque temps, il s’est directement rendu dans le chef-lieu du département de la Boumba et Ngoko, région de l’Est Cameroun où le mariage avec celle qui était encore sa fiancée a été célébré avec faste il y a quelques jours. Une fois les festivités terminées, le beau frère, sous la conduite de son épouse s’est alors, à faire le tour de la belle famille en signe de remerciements. Il se trouve que la mariée est une cousine très proche d’Abono Moampamb Paulin, l’ex-maire de Yokadouma et ex-secrétaire d’Etat auprès du ministre des Travaux publics, sous mandat de dépôt depuis plus de deux ans à la prison principale de Yokadouma. Peter Lock décide alors de rendre visite à son « beau ». Ladite visite a lieu très tôt dans la matinée du lundi 29 mars 2010. Il était prévu que les époux qui devaient regagner Yaoundé le même jour fassent un arrêt rapide à la prison de Yokadouma pour dire bonjour et au revoir au frère et au beau-frère qu’est Abono Paulin.

Bien que ne disposant pas de permis de communiquer, la mariée qui est née et a grandi à Yokadouma réussit à convaincre un gardien de prison qui accepte qu’elle puisse aller avec son époux jusqu’au parloir où l’ex secrétaire d’Etat est conduit quelques temps après. Après des échanges chaleureux, Peter Lock qui rencontrait apparemment son beau-frère pour la première fois décide d’immortaliser ces moments avec son appareil photographique, puis une camera qu’il avait amenée pour les besoins des festivités de son mariage. Sur le champ, il n’y a aucun incident. Jusqu’à ce qu’arrive un autre gardien de prison. Nos sources indiquent alors que le geôlier aurait d’abord voulu que « ces visiteurs frauduleux » comme il les aurait appelés et identifiés lui versent un petit pourboire pour qu’il laisse tomber l’affaire de l’introduction de la caméra au sein de la prison. Ce à quoi les concernés n’ont pas accédé.

Madame Abono en colère

C’est alors que l’affaire vire immédiatement au drame. Car le geôlier informe le régisseur qui lui, va saisir, Roger Sayem, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de la Boumba et Ngoko. Secret de polichinelle à Yokadouma, le magistrat procureur et l’ex-secrétaire d’Etat auprès au ministère des Travaux publics se détestent cordialement. Au point que le premier avait pris des mesures disciplinaires très strictes à l’encontre du prisonnier Abono Paulin, allant entre autres jusqu’à lui interdire de visite. Alerté par le régisseur, Roger Sayem veut en savoir davantage sur cette visite du Néerlandais. Peter Lock est ainsi conduit manu militari à la compagnie de gendarmerie où il est entendu pendant des heures.

« Les gendarmes qui obéissaient aux ordres du procureur de la République lui ont posé des questions violentes qui ont fait découvrir à cet étranger que le Cameroun est un pays difficile, où règne la torture et la violation des droits de l’Homme », indique une source vivant à Yokadouma qui précise que le Néerlandais a été torturé moralement par un gendarme au doux surnom de « Guantanamo ». Il a fallu que madame Abono Moampamb, l’épouse de l’ex- maire de Yokadouma, qui se trouvait à Yokadouma pour le mariage de Peter Lock et de sa belle-sœur, excédée, craque et aille protester vivement à la compagnie de gendarmerie, après avoir informé par téléphone le secrétaire d’Etat à la Défense, Jean Baptiste Bokam de la situation, pour que les gendarmes consentent à remettre à Peter Lock son passeport et ses autres documents personnels confisqués. Le Hollandais sera finalement libéré quelques heures plus tard.

Focal: Acharnement ?

Selon des sources dignes de foi, Abono Paulin dont la situation judiciaire semble s’enliser, contrairement à ce que prescrit le Code de procédure pénale, serait la cible d’un acharnement tenace. Il y a quelques semaines, ses proches ont signalé une requête anonyme envoyée au vice-Premier ministre, ministre de la Justice garde des sceaux. Dans ladite requête, il aurait été question d’une demande de transfèrement d’Abono Paulin pour une autre prison loin de Yokadouma.

L’autre situation est liée à un mouvement de transe observé chez certains élèves du lycée classique de Yokadouma depuis le mois de janvier 2010. L’on a fait répandre à Yokadouma la rumeur selon laquelle les élèves qui tombent en transe prononcent tous, le nom d’Abono Paulin Moampamb avant de tomber dans l’inconscience. Une affaire qui aurait commencé à irriter certains parents d’élèves dans le chef-lieu du département de la Boumba et Ngoko.