Par lemessager | Lundi 8 février 2010 | Le Messager
Ils sont quatre, de nationalité nigériane, bien connus des populations de la ville de Kumba où ils se sont établis depuis plusieurs années. Portés disparus, ils sont actuellement activement recherchés par la police camerounaise. Comme des têtes bien pensantes, ils ont réussi à prendre la poudre d’escampette avec plus de 100 millions de nos francs représentant l’épargne des Camerounais, clients de « Virgo solutions » une entreprise de micro finance que les fuyards ont mis sur pied à Kumba, une ville très commerciale. Pour s’attirer la confiance et la ruée des épargnants, les escrocs avaient promis de leur donner de gros crédits dépassant de loin le montant épargné. Mais pour en bénéficier, l’épargnant devait d’abord ouvrir un compte et n’attendre que quelques semaines avant d’y effectuer la moindre transaction financière.
Voyant que les montants des crédits proposés étaient alléchants contrairement à ceux des banques ordinaires, les épargnants tels des poissons, mordent à l’appât. Par dizaines, en majorité des commerçants du marché central de Kumba, ils vont placer leur argent à « Virgo solutions ». D’aucuns iront jusqu’à emprunter dans les caisses des tontines pour venir garder dans cette coopérative en attendant le moment indiqué pour demander le crédit. Tout se passait plutôt bien et tous les épargnants ne se doutaient de rien jusqu’à la semaine dernière où, tous ont été pris au dépourvu en apprenant la triste nouvelle de la disparition de ce groupe de quatre Nigérians avec dans leurs valises plus de 100 millions de Fcfa, un pactole représentant les dépôts de plusieurs épargnants de la ville de Kumba. Une ville qui, jusqu’à hier au moment où nous allions sous presse, cachait mal son embarras face à cette grosse escroquerie à ciel ouvert organisée au nez et à la barbe des autorités locales.
Toute la ville de Kumba et singulièrement le marché central (Main gate), vit dans l’émoi, certains commerçants ne savent plus à quel saint se vouer. Depuis la fin de la semaine dernière, beaucoup cherchent à comprendre la facilité avec laquelle les escrocs ont pu réussir leur coup. Comment ont-ils obtenu leur agrément ? La polémique enfle, les soupçons se précisent. Selon nos sources, la supercherie s’est produite bien avant jeudi 4 février 2010. « J’ai eu l’information tard dans la nuit de jeudi par un ami qui en avait entendu parler par ouie dire. Le lendemain matin quand je me suis rendu sur les lieux, je n’en revenais pas. Le fait qu’ils aient dit qu’on ne pouvait effectuer des opérations de retrait dans notre compte qu’après des semaines était une preuve qu’ils préparaient bien un coup. Mais personne ne les a vus venir. Nous étions aveuglés par des offres mirobolantes qu’ils nous proposaient», témoigne une victime qui comme la quasi majorité des épargnants qui, mis au parfum de la fuite des responsables de la micro finance, s’est rué sur les lieux. Certains ne pouvaient s’empêcher de fondre en larmes. « Tant la découverte était assommante. Cet endroit qui tenait lieu de locaux était vide. Sur une table abandonnée, il y avait un vieil ordinateur et des machines à calculer. A première vue, tout pouvait laisser croire qu’ils étaient très pressés au point qu’ils ont omis de tout emporter », précise notre source qui souligne qu’elle venait, sur insistance d’une amie, d’ouvrir un compte dans cette micro finance.
Focal
Pis-aller déconcertant
Le secteur de la micro finance a pignon sur rue au Cameroun. Ils s’en créent chaque jour. Autant qu’ils en tombent en faillite. La perméabilité du secteur du fait d’une administration laxiste a donné libre cours à toutes sortes d’aventuriers qui s’y engouffrent et pillent sans vergogne les pauvres Cfa des Camerounais. Certes la réglementation du secteur est entrée en vigueur depuis avril 2002. Mais jusqu’à présent, il n’y a pas eu de véritables campagnes de sensibilisation et de vulgarisation de cette réglementation. C’est peu de dire qu’il existe un coupable pis-aller dans le secteur. Certes, la COBAC de temps en temps essaie de mettre le holà et rappeler à l’ordre certains dirigeants sur leurs manquements. Malgré cela, rien ne semble vraiment indiquer que chaque partie a pris effectivement conscience de ce que beaucoup d’efforts restent à fournir pour finaliser l’assainissement de ce secteur.
Vu sous un angle global, il est clair qu’au stade actuel des choses, des actions nécessaires doivent être menées dans le sens d’attirer l’attention des dirigeants d’Etablissement de micro-finance (EMF) sur leurs manquements. Et cela passe par des contrôles pédagogiques. Des formations pourront à cet effet être une décision salutaire pour l’industrie de la micro finance au Cameroun qui a ceci de particulier que la micro finance, selon des experts en la matière, (voir Le Messager du 8 août 2008) est bâtie à 90% sur les efforts des opérateurs économiques nationaux. Contrairement aux pays d’Afrique de l’Ouest, d’Asie ou d’Amérique latine où elle est appuyée par des programmes et des subventions des bailleurs de fonds internationaux. Ceci étant, au cours de leur difficile mise en oeuvre, les EMF font montre d’un certain nombre de limites dans la gouvernance, la qualité de la main d’oeuvre, le système de contrôle interne, le système d’information de gestion, les écarts de certains de leurs dirigeants.
Ce qui vient de se passer à Kumba vient rappeler aux uns et aux autres la nécessité de réguler. Déjà la semaine dernière, Le Messager dans son édition du jeudi 4 février annonçait les difficultés des épargnants de la Caisse communautaire d’investissement (CCI) à effectuer des retraits de leurs dépôts. Et pour cause, les caisses de l’entreprise sont vides, jetant des centaines d’épargnants aux abois. La grosse escroquerie de Kumba sonne donc comme une invite de l’Etat à plus de vigilance dans le processus de création et de développement de ces structures bancaires. Il faudrait désormais savoir qui fait quoi dans cette nébuleuse.
B-P.D. (cp)
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