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Portraits de quelques héros oubliés

Posted by Admin on May 20th, 2010 and filed under Featured, Politique. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0. Both comments and pings are currently closed.

Par honore.foimoukom | Jeudi 20 mai 2010 | Le Messager

André Marie Mbida
Ecarté du fauteuil présidentiel par Ramadier et Ahidjo

« André Marie Mbida a lui-même creusé sa propre tombe par ses prises de position très tranchées et brutales. » Telles sont les explications données par Ananie Rabier Bindji, présentateur de l’émission à succès La Tribune de l’Histoire, diffusée sur la chaîne de télévision privée Canal 2 International, pour faciliter la compréhension de la chute vertigineuse de l’homme d’Etat camerounais André Marie Mbida dont l’ascension fut fulgurante dans les années 50, lors du processus ayant abouti à l’indépendance du Cameroun le 1er janvier 1960. Né le 1er janvier 1917 à Endinding (Cameroun), André Marie Mbida, issu de la région de Nyong et Sanaga (actuellement scindée en Sanaga Maritime et Nyong et Kellé) au Cameroun, a fréquenté l’école primaire d’Éfok (département de la Lekié), le petit séminaire d’Akono de 1929 à 1935 où il exercera par la suite comme professeur de mathématiques et de latin, puis le grand séminaire de Mvolyé de 1935 à 1943.
Premier camerounais natif à être élu député à l’Assemblée nationale française en 1952, Premier ministre du Cameroun, deuxième Premier ministre africain natif dans le continent noir, premier chef d’État du Cameroun autonome d’expression française du 12 mai 1957 au 16 février 1958 et premier prisonnier politique du Cameroun indépendant, du 29 juin 1962 au 29 juin 1965, cet homme politique qui a par ailleurs reçu une formation de juriste après avoir été directeur de l’école rurale de Balessing après son départ du grand séminaire en 1943, était compétent dans plusieurs domaines. En marge de ses activités politiques au sein du Bloc démocratique camerounais (Bdc) dont il était un des militants de premier plan, il exerça la fonction d’agent du Trésor à Yaoundé en 1945, durant une année, avant de devenir agent d’affaires à Ebolowa et Yaoundé, jusqu’en 1954. Comme agent d’affaires, ses revenus mensuels varient entre 500 000, 800 000 Fcfa et un million Fcfa []!
Au Cameroun, la belle carrière politique d’André Marie Mbida tourne au vinaigre le 16 février 1958, à la suite d’un coup de force orchestré par le haut-commissaire Jean Ramadier qui suscite le dépôt de motions de censure contre le gouvernement Mbida, refuse d’entériner le remaniement gouvernemental de Mbida après la démission d’Ahidjo de la coalition parlementaire à l’Alcam, abuse de ses prérogatives de haut-commissaire malgré les textes, fait des dons de 200 000 Fcfa à []tous les parlementaires camerounais qui se ligueront contre Mbida. Mis en minorité, André Marie Mbida démissionne. Il est remplacé, le 18 février 1958, par Ahmadou Ahidjo qui sera par la suite président de la République de 1960 à 1982. Ahidjo qui était au début son ami (et ex vice-Premier ministre de son gouvernement) a voulu l’intégrer dans son premier gouvernement, mais, comme il était en désaccord avec la politique extrêmement pro-française d’Ahidjo, il refusa et s’exila.
Le 16 septembre 1958, alors qu’il est de passage à Paris, André-Marie Mbida se prononce pour l’indépendance immédiate[]. Le 3 octobre 1958, son parti politique, par voix de communiqué presse, demande « l’indépendance immédiate du Cameroun – l’amnistie totale – la levée de tutelle »[]. Sa formation politique, le Parti des démocrates camerounais (Pdc), demandera même une indépendance au 1er janvier 1959. Au cours des années 1961-1962, la vague de ralliements, de dissolutions et de fusions des autres partis avec l’Union camerounaise (Uc) d’Ahidjo affaiblit considérablement le Pdc qui ne comptait plus que quatre sièges à l’Assemblée nationale en 1962. Après l’appel du 27 avril 1962, suite à la dispersion des upécistes à leur premier congrès (en janvier 1962) depuis leur réhabilitation, André-Marie Mbida et d’autres leaders de l’opposition comme Bebey-Eyidi (sécrétaire général du Parti travailliste Camerounais), Okala Charles Réné Guy (sécrétaire du Parti socialiste camerounais) et Théodore Mayi-Matip (Union des populations du cameroun) sont arrêtés et incarcérés dans le Nord-Cameroun.
Cette détention provoque une dégradation physique importante chez Mbida : il tombe malade et devient pratiquement aveugle. À sa sortie de prison en 1965, il est placé en résidence surveillée. Il se rend en France se faire soigner à l’hôpital des Quinze-Vingts en 1966. De retour au Cameroun deux ans plus tard, il est de nouveau mis en résidence surveillée à Yaoundé du 3  août 1968 au 30 mai 1972. Les derniers moments de sa vie furent quelque peu pénibles car faits de solitude. En 1980, cet homme d’Etat qui s’était marié à Marguerite Embolo le 14 août 1946 connaît une nouvelle évacuation sanitaire, mais décède, aveugle, à 63 ans des suites de tous ces sévices, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière le 2 mai 1980 où il avait été admis deux semaines auparavant. En laissant six enfants (quatre fils et deux filles) dont l’actuel président du Parti des démocrates camerounais, Louis-Tobie Mbida et Simon Pierre Omgba Mbida, diplomate camerounais.

Ruben Um Nyobe
Un nationaliste trahi par un de siens

Leader nationaliste camerounais et précurseur des indépendances en Afrique francophone né en 1913 à Eog Makon non-loin de Boumnyébel, ville du Cameroun, située dans l’arrondissement d’Eséka, à environ 70 km de Yaoundé, Ruben Um Nyobe est l’une des figures emblématiques de la lutte pour l’indépendance du Cameroun, comme Félix-Roland Moumié et Ernest Ouandié, avec qui il partage la même fin dramatique. Issu de l’union de Nyobé Nsounga et de Ngo Um Nonos, tous deux paysans bassa, Um Nyobe qui fit ses études primaires dans les écoles presbytériennes locales, n’avait pas participé à la création de l’Union des populations du Cameroun (Upc) dans la nuit du 10 avril 1948 dans un café-bar de Douala-Bassa dénommé « Chez Sierra »[]. Bien qu’il fût absent cette nuit-là, Chez Sierra, Ruben Um Nyobe fut informé. Une suggestion de la majorité des présents, membres fondateurs de l’Upc qui sont aussi membres du bureau directeur de l’Uscc dont Ruben Um Nyobè en est le secrétaire général. Suite au laxisme du premier secrétaire général de ce parti nationaliste, Ruben Um Nyobè connu pour sa véhémence est propulsé à la tête du parti au mois de novembre 1948. Il s’y caractérisera par son franc-parler et ses nombreux écrits. Il s’opposera au pouvoir colonial français et réclamera selon ses termes « une indépendance totale » suscitant alors une prise de conscience nationale et provoquant la décolonisation qui allait suivre en 1960, après lui. Véritable tribun, il se rendra deux fois aux Nations-Unies grâce aux cotisations de pauvres paysans camerounais afin de plaider la cause du Cameroun.
A en croire Ananie Rabier Bindji qui a effectué de nombreuses recherches sur le nationalisme camerounais et même dans certains autres pays africains, Ruben Um Nyobe qui travailla à la Météo fut géomètre et même greffier, est le tout premier nationaliste camerounais à avoir accepté de se sacrifier dans le cadre de la lutte pour l’accession à l’indépendance du Cameroun. « Les vrais malheurs de Ruben Um Nyobe ont atteint leur point culminant en avril 1956 quand l’administration coloniale s’est rendue compte que, sur le manifeste portant les noms des passagers d’un avion qui s’est écrasé en pays bassa’a, se trouve le nom du Mpodol qui, heureusement pour lui, n’était pas entré dans l’avion à Yaoundé, en partance pour Douala. Suspecté donc par les Français qui pensaient que Ruben Um Nyobe savait quelque chose de ce crash, le leader nationaliste de l’Union des populations du Cameroun (Upc) va prendre le chemin du maquis et sera par la suite pourchassé et tué le 13 septembre 1958 près de la grotte Libel Lingoï par Boumnyebel, à la suite de la trahison d’un de ses acolytes, Théodore Mayi Matip », explique le journaliste-chercheur qui, par ailleurs, soutient que Ruben Um Nyobe était un stratège qui s’opposait au pouvoir colonial français et exigeait une unification immédiate et l’indépendance du Cameroun.
On se souvient d’ailleurs que, dans son discours devant la 4e Commission de tutelle de l’Assemblée générale de l’Organisation des nations unies (Onu) le 7 décembre 1952, Ruben Um Nyobe avait précisé : « Il est question de demander à l’Organisation des Nations-Unies de trouver de véritables solutions qui permettront aux Camerounais d’accéder à leur indépendance dans un avenir raisonnable c’est- à-dire le plus proche possible. Et nous sommes modérés dans notre action. Nous ne demandons pas d’indépendance immédiate. Nous demandons l’unification immédiate de notre pays et la fixation d’un délai pour l’indépendance. »[] Ruben Um Nyobè plaçait donc la réunification en dehors de l’indépendance. Il estimait que celle-ci était même un préalable à l’indépendance. C’est ainsi qu’il proposa à l’Onu « (…) un programme-école, c’est-à-dire, un programme dont l’exécution permettrait aux Camerounais de recevoir une formation adéquate, pour pouvoir assumer les charges d’Etat découlant du recouvrement de notre souveraineté »[]. D’après son allocution, c’était « (…) pour permettre aux citoyens de notre pays d’apprendre, pendant un laps de temps, à diriger, sous l’égide d’un haut-commissaire de l’Onu, le gouvernement de leur pays ». [] Quand à la durée du programme-école, il proposa une période « (…) de dix ans préparatoire à l’indépendance ».[]
Au lendemain des élections du 23 décembre 1956 ayant porté André Marie Mbida à la fonction de chef de l’Etat du Cameroun, Pierre Messmer alors Haut commissaire, suggère l’organisation d’une élection partielle, tout spécialement pour Ruben Um Nyobè, afin de l’intégrer à l’Assemblée législative du Cameroun. []Il envoie de ce fait l’archevêque de Douala, Monseigneur Thomas Mongo, à la rencontre de Um Nyobè pour des pourparlers. Celui-ci déclare que « les institutions mises en place sont fantoches car l’Upc n’en a pas le contrôle » []et exige d’être « désigné Premier ministre », à la place d’André-Marie Mbida []. Il demande « que Pierre Messmer accepte une rencontre publique avec lui » [] et « que l’Upc forme un gouvernement d’union nationale »[]. Lors de la deuxième rencontre avec le prélat, « il lui fait savoir que le Comité central de l’Upc a siégé, et qu’il a conclu que Ruben Um Nyobè ne peut accepter qu’une seule et unique chose : le poste de Premier ministre et rien d’autre ».[] Or, c’est la coalition parlementaire Paysans indépendants, Union camerounaise (Uc) et Démocrates camerounais (Dc) qui gouverne. De plus, ces groupes parlementaires forment à eux seuls la quasi totalité des députés à l’Assemblée législative. Une élection dans la région de Ruben Um Nyobè ne changera pas le rapport de force. De plus, le Haut Commissaire Pierre Messmer ne peut pas juridiquement révoquer le Premier ministre André-Marie Mbida. En effet, d’après les statuts de l’Etat autonome du Cameroun, un Haut-commissaire ne peut en aucun cas démettre un Premier ministre de ses fonctions[].
Um Nyobé sera finalement abattu par l’armée française le 13 septembre 1958 après de longs mois de traque infernale et fort meurtrière contre tous ses partisans, tous tués ou capturés les uns après les autres. C’est que son campement fut localisé en début septembre 1958 par le capitaine Agostini, officier des renseignements et par M. Conan, inspecteur de la sûreté. Après l’avoir tué, les militaires traînèrent son cadavre dans la boue, jusqu’au village Liyong. Cela le défigura, sa peau, sa tête et son visage étant profondément déchirés. La force coloniale voulut par ce fait « détruire l’individualité de son corps et le ramener à la masse informe et méconnaissable », affirme J.-A. Mbembe. C’est dans le même esprit, poursuit-il, qu’ « on ne lui accorda qu’une tombe misérable et anonyme. Aucune épitaphe, aucun signalement particulier n’y furent inscrits. Puisqu’il fallait nier tout ce dont sa vie témoignait, en faisant un mort sans visage, rien ne devait subsister qui fît briller sur ce cadavre un dernier reflet de sa vie. Les autorités coloniales le firent enterrer sans cérémonie, immergé dans un bloc massif de béton. » Ruben Um Nyobe est officiellement proclamé héros national par l’Assemblée nationale du Cameroun le 27 juin 1991.

Ernest Ouandié
Le dernier vrai cauchemar d’Ahmadou Ahidjo

Né en 1924 à Ndumba (arrondissement de Bana) dans le département du Haut-Nkam, Ernest Ouandié qui, d’après de nombreux témoignages, serait originaire de Bangou dans le département des Hauts-Plateaux, est le 5è enfant d’une fratrie de 7 personnes (Ngako, Yemdo, Mboutchak, Djieumo, Ouandié, Djoma et Kamdem) issues de la même mère dans un foyer polygamique. En effet, outre la mère (Kapsu) du nationaliste Ernest Ouandié, le père (Djemo) de celui-ci avait deux autres épouses. De 1933 à 1936, Ernest Ouandié fait ses études à l’école publique de Bafoussam (quartier Famla), en compagnie d’autres personnes qui, comme lui, marqueront l’histoire du Cameroun : docteur Tagny Mathieu, président de la section du Nyong et Sanaga   de l’Upc, Feyou de Happy, futur collaborateur de Kodock, le redoutable Kame Samuel, futur proche collaborateur d’Ahidjo pour les affaires politiques et de sécurité. En 1937, il est inscrit au cours moyen 1ère année à l’école régionale de Dschang et est, en 1940, reçu au Cepe et à l’examen d’entrée à l’Ecole primaire supérieure de Yaoundé, section enseignement où il étudie grâce à une bourse jusqu’à l’obtention du diplôme des moniteurs indigènes (Dmi) en novembre 1943.
Enseignant dans le secteur public, Ernest Ouandié s’illustre par son engagement syndical et ses activités politiques partout où il est en fonction. Des engagements qui sont à l’origine de ses multiples affectations dites disciplinaires. Bref, de 1944 à 1955, il mènera, dans la légalité, de nombreuses activités professionnelle, syndicale et politique. 1944-1948, il enseigne à Edéa et milite dans l’Union des syndicats confédérés du Cameroun (Uscc). De 1948  au 15 janvier 1971, militant, puis dirigeant de l’Union des populations du Cameroun (Upc). 7 octobre 1948, il est affecté à Dschang. Le 6 novembre 1948, un mois après, il est affecté à Douala comme directeur de l’école publique du quartier New-Bell Bamiléké. En septembre 1952, il est élu vice-président de l’Upc chargé de l’organisation et directeur de la Voix du Cameroun au 2ème congrès à Eséka. En 1953, affectation à Doumé, puis à Yoko ; il implante l’Upc dans le Mbam. Du 29 juillet au 12 septembre 1954, il effectue un voyage en Chine où il assiste du 9 au 15 août 1954, au Congrès mondial de la jeunesse démocratique, puis à Paris et à Moscou. Le 29 janvier 1955, il est à nouveau affecté à Douala où le Haut commissaire Roland Pré entreprend de rassembler tous les dirigeants de l’Upc pour les tenir en permanence à sa portée.
Au cours d’une grande rencontre à la salle des fêtes d’Akwa en début d’année 1955, Ernest Ouandié s’attire beaucoup de sympathie par ses prises de position contre Léopold Sédar Senghor qui tentait, à l’instigation de l’administration coloniale et du haut de son agrégation en grammaire, de convaincre les Camerounais d’abandonner la revendication de l’indépendance nationale. Après l’interdiction de l’Upc et les massacres perpétrés par l’administration coloniale contre les militants au mois de mai de cette année 1955, Ernest Ouandié et les autres cadres de l’Upc, de la Jdc, de l’Udefec, de la Cgkt dont Félix Roland Moumié et Abel Kingue qui ont pu échapper aux arrestations, se réfugient à Kumba, dans le Cameroun sous administration britannique. Le 3 juin 1957, l’Upc est interdite au Cameroun britannique à la demande des autorités françaises. Conséquence, Ernest Ouandié est, le 7 juillet 1957, déporté par l’administration britannique à Khartoum avec une douzaine d’autres dirigeants et cadres de l’Upc, puis au Caire, à Conakry et à Accra. Partout où il passe, Ernest Ouandie travaille à populariser la lutte de l’Upc, à susciter des soutiens, trouver des moyens matériels et financiers pour poursuivre la lutte, renforcer l’organisation, la formation des cadres, etc. C’est, à la suite du décès de Félix Roland Moumié à Genève le 3 novembre 1960, que Ernest Ouandié, avec l’accord de Abel Kingué malade, prend la direction de l’Upc et prête serment de continuer la lutte jusqu’à l’atteinte des objectifs nationaux et populaires de cette formation politique.
Ernest Ouandié retourne au Cameroun dans la clandestinité le 21 juillet 1961, pour diriger la lutte sur le terrain. Ce retour, sous le nom de « Camarade Emile », a lieu sous la conduite du commandant Etienne Mobil, dans le maquis du Moungo, au Mont Koupé, campement Kribi. Ernest Ouandié prend effectivement le commandement de l’Alnk et remet de l’ordre dans les rangs. Il se rend dans le Nyong et Kéllé pour rencontrer les dirigeants et cadres encore fidèles à l’Upc dans la région. Le 13 septembre 1962 et le 25 avril 1963, il préside deux Assemblées populaires sous maquis qui décident de la création d’un Comité révolutionnaire et d’un état-major de l’Alnk ; il enseigne l’art de la guerre, ouvre une école des cadres politiques et construit des centres de soins. Sous les coups de boutoir de l’ennemi, il se replie progressivement à Melong (fin 1962), puis du côté de Dschang, de Bafang, de la région de Moya dans le Ndé, puis Batcha dans le Haut – Nkam. Il résiste pratiquement seul, complètement coupé de ses bases arrières et sans ravitaillement en armes, munitions, vêtements, chaussures, médicaments, nourriture, pendant 9 ans contre des forces militaires infiniment plus grandes et très largement approvisionnées, dans un espace à peine plus grand qu’un mouchoir de poche, lorsque, lâché par les uns et trahi par les autres, et, sous prétexte de tentative d’exfiltration, il est amené par l’évêque Albert Ndogmo à se rendre. Il se rend lui-même à la gendarmerie de Mbanga le 19 août 1970. « Je suis Ernest Ouandié », se présente-t-il au gendarme de garde. Il se laisse passer les menottes sans opposer de résistance. Transféré à la Brigade mixte mobile (Bmm) de Yaoundé, il est torturé et gardé au secret pendant six mois sans pouvoir rencontrer une seule fois un seul de ses avocats. Ses deux avocats français constitués par les upécistes, Maître Jean-Jacques de Félice et Maître Jacques Vergès, sont empêchés de se rendre au Cameroun malgré une convention franco-camerounaise qui prévoit expressément la possibilité pour un avocat français d’exercer au Cameroun, pour peu qu’il soit domicilié au cabinet d’un avocat inscrit au barreau camerounais.
Jugé par le tribunal militaire de Yaoundé à partir du 21 décembre 1970 dans un procès de pure forme dit « le procès de la rébellion », Ernest Ouandié est condamné à mort le 5 janvier 1971. Muré dans un silence presque hautain, fidèle à son image de militant ferme et courageux, il écoute, impassible, le verdict de condamnation à la peine capitale, avec Mathieu Njassep alias Ben Bella (encore vivant) son fidèle secrétaire, et Raphaël Fotsing. Malgré un mouvement de protestation contre les conditions inéquitables de son jugement mené notamment par un Comité international dirigé par le Professeur Jacques Monod, le 15 janvier 1971, il est extrait tôt de la cellule où il est resté enchaîné pendant six mois à la Bmm de Yaoundé, transporté par avion militaire jusqu’à Bafoussam, au quartier Famla, et exécuté publiquement, sur la place qui deviendra la place des Martyrs, en compagnie de Gabriel Tabeu (Wambo Le Courant) et de Raphaël Fotsing. Au moment du supplice, il refuse de se faire bander les yeux. Avant d’être criblé de balles, il proclame simplement la certitude qu’après lui, d’autres continueront le même combat jusqu’à la victoire. Ernest Ouandié qui a été inhumé au cimetière de l’église protestante de Bafoussam s’était marié à Marthe Eding (sœur de feu Bernard Eding) en secondes noces (il avait d’abord épousé Njila avec qui il eût un enfant décédé en bas âge, avant leur divorce) et eu avec elle cinq enfants : Philippe Ouandié, Mireille, Irène, Monique, Ruben Um Ouandié. Hors mariage, il aura eu au moins 3 autres enfants dont Ernestine.
21 ans après qu’il ait été lâchement assassiné, Ernest Ouandié est réhabilité par la loi n° 91/022 du 16 décembre 1991 et proclamé héros national par l’Assemblée nationale du Cameroun le 27 juin 1991. Chiche !

Ossende Afana
L’intello abattu en pleine ascension

« Castor Osende Afana a été tué sur le pont de la Boumba et Ngoko le 15 mars 1966. Il s’était retiré au Congo. Son compagnon de lutte Woungly Massaga était établi à Djoum. A l’Ouest, la résistance était menée par Ernest Ouandié. Osende Afana, brillant économiste, a eu des problèmes avec le Congolais qui l’hébergeait. Celui-ci a obtenu de sa hiérarchie qu’il soit renvoyé chez lui. C’est ainsi qu’il se retrouve à l’Est Cameroun, est repéré et tué. » Ossendé Afana était une des têtes pensantes du nationalisme camerounais dans les années 50 et 60. Né en 1930 à Ngoksa, près de Sa’a, dans la région du Centre du Cameroun, Osende Afana qui a été tué le 15 mars1966 à Ndélélé, non loin de la frontière entre le Cameroun et le Congo, est considéré par plusieurs Camerounais comme un héros national. Moins connu que ses prédécesseurs à la tête de l’Upc – Ruben Um Nyobé et Félix-Roland Moumié –, et même que son alter ego sur le front de l’Ouest, Ernest Ouandié, il a pourtant fini assassiné comme eux. Tout comme ces trois, il a payé le prix fort en luttant pour libérer le Cameroun et, l’Afrique du colonialisme et néocolonialisme.

Exclu du grand séminaire à cause de ses idées jugées subversives au début des années 50, il fréquente le lycée général Leclerc de Yaoundé en 1952. Il obtient son baccalauréat et, la même année, fait partie des meneurs d’une grève organisée par les élèves Black qui revendiquaient de meilleures conditions de vie à l’internat. Osende Afana est déjà connu par l’administration coloniale comme un élément anti-colonial. Son esprit frondeur   et ses élans  révolutionnaires précoces vont s’accentuer à Toulouse (ville française) où il poursuit ses études supérieures en économie politique sanctionnées par un doctorat. En 1954, il représente l’Association des étudiants camerounais (Aec) à la commission d’attribution, à la fédération des étudiants d’Afrique noire en  France (Feanf). Il en devient le vice-président et, en 1957, le trésorier général, puis s’installe à Paris. En 1958, il quitte clandestinement la France pour l’Egypte où il rejoint la direction de l’Upc en exil. Il devient après l’assassinat de Ruben Un Nyobe le 13 septembre 1958, un collaborateur important de Félix Roland Moumie, Ernest Ouandie et Abel Kingue. Nommé représentant de l’Upc au secrétariat permanent Afro-asiatique au Caire, Osende Afana apporte son savoir-faire pour faire avancer la cause nationaliste. Il a fait partie de la délégation qui allait défendre aux Nations-Unies l’idée de l’Indépendance du Cameroun.
La mort tragique du président Moumié, le 3 novembre 1960 à Genève de suite d’un empoisonnement au thallium entraîna la constitution d’un comité révolutionnaire des sept personnes : Ernest Ouandié, Abel Kingue, Osende Afana, Nicanor Njawe, Ndongo Diye, Michel Ndoh et Woungly Massaga. Deux des sept membres de ce comité vont choisir de retourner aux maquis : Ernest Ouandié et Osende Afana. L’un et l’autre prennent respectivement la direction du front de l’Ouest et du front de l’Est. Mal préparé et, sans doute, trahi, Osende Afana est repéré, pourchassé et abattu avec ses compagnons de lutte du deuxième front, aux frontières du Cameroun avec le Congo. Il était âgé de 36 ans lorsqu’il fut assassiné à Ndélélé par les forces de sécurité de l’armée coloniale au service du  feu président Ahmadou Ahidjo. Ce 16 Mars 1966, que s’est-il passé ? Les archives sur cet épisode sont jalousement gardées par le pouvoir…

Synthèse de Honore Foimoukom


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