MENDICITE DANS LES BOÎTES DE NUIT : Dj Douala, 16 ans de Disc Jockey, en parle

Bonjour Dj Douala et merci de nous accorder cette interview !

Bonjour, c’est moi qui vous remercie.

Les Dj étaient autrefois très nobles et responsables. Pourquoi ont-ils tendance à mendier de plus en plus dans les boîtes de nuit ?

Certains Dj font cela parce que trouver de l’emploi dans la société actuelle est très difficile. Ce qui fait que quand quelqu’un, selon sa manière à lui, réussit à apprendre le métier dans les coulisses et à décrocher un poste de Disc Jockey quelque part, il n’hésite pas à accepter l’emploi quelque soit le salaire qu’on lui propose. Vu les circonstances du métier, et sachant qu’il ne peut pas s’en sortir avec ce salaire, il accepte tout de même de faire avec. Pour certains, dans les débuts, il bosse normalement sans mendier. Mais quelques mois après, voyant que ce salaire ne peut pas couvrir certaines de ses charges, il opte pour la mendicité. L’essentiel étant d’arriver à arrondir les fins de mois.

Comment procèdent-ils, les Dj ?

Eh, bien, c’est facile ! Ils se font des amis parmi les clients aisés. Et derrière cette sympathie très intéressée et calculatrice, ils en profitent pour demander des sous. Bon, certains Messieurs respectueux le comprennent de façon à ne pas les offenser. Mais la plupart du temps, les clients se fâchent. D’autres, eux, vont jusqu’à se plaindre auprès des gérants et des patrons des lieux. Certains passent par le canal de la vente des CD pour arnaquer les clients. Un CD gravé qui vaut normalement 2000 frs, un Dj va jusqu’à exiger 5 ou 10 000 frs Cfa par CD, en fonction du client qui est en face. D’autres, par contre, préfèrent « offrir » lesdits CD gravés, mais attendent quelque chose en retour. Et un jour, ils débarquent au bureau, ils vous appellent et vous posent leurs problèmes de loyers, d’ordonnance à l’hôpital, de factures d’électricité ou des problèmes de scolarisation des enfants. Face à cela, c’est difficile souvent pour le client de refuser à cause de la sympathie que le mâlin Dj a pris le soin de créer au début. Vous convenez avec moi que tout ceci n’est qu’une stratégie de mendicité. D’autres Dj passent par le moyen d’Atalaku (coupé-décalé, accompagné de louanges) pour arracher des billets d’argent aux clients. Et ça, c’est de la mendicité.

Dites-nous, il n’y a pas que les Dj qui mendient. Il y a aussi les serveuses. Comment se comportent-elles devant les clients ?

Certaines serveuses passent par le canal de leur beauté physique pour arnaquer lesclients. Des fois, certaines d’entre elles profitent de l’état d’ivresse d’un client pour lui faire une surfacturation. Il y en d’autres qui connaissent les nouveaux clients. Et quand ces derniers demandent le prix d’une bouteille de whisky, le prix augmente automatiquement. Il y en a aussi qui font exprès de ne pas rembourser les clients, à cause du fait qu’elle a eu à échanger des mots gentils avec ces derniers. Et certains clients s’énervent. Comme stratégie, les serveuses séduisent les clients par leurs atouts physiques, dès qu’elles s’aperçoivent qu’ils sont pleins aux as. Pour d’autres, elles n’hésitent pas à demander à boire ou de l’argent dès que le client se montre sympa. L’argent du pot est souvent converti en argent de taxi. Pour les portiers, et autres barmen, ce sont les mêmes techniques. En général, il faut noter que rares sont les employés de boîtes de nuit ou cabarets qui se sentent à l’aise avec leurs revenus mensuels. Malheureusement, vu la situation du monde de l’emploi au Cameroun, beaucoup préfèrent travailler ainsi au lieu de braquer ou de crever de faim.

A quoi ressemble un peu la grille des salaires dans la filière débits de boisson, boites de nuit ou cabarets ?

Ceux qui touchent bien, ce sont souvent les Directeurs de boîtes de nuit. Ces derniers touchent souvent entre 200 000 et 500 000 francs Cfa par mois (pour les grandes boîtes de nuit), tandis que leurs collègues des petites boîtes de nuit doivent se contenter de 100 000 frs le mois. Quant au Disc Jockeys, ceux des boîtes hyper branchées se retrouvent souvent avec 200 000 frs ou 80 000 frs le mois (en fonction des boîtes), alors que leurs collègues des boîtes moyennes et petites doivent s’en tirer respectivement avec 70 000-50 000 frs Cfa et 40 000-30 000 frs Cfa. Les portiers, eux, tournent autour de 100 000-50 000 frs Cfa (grandes boîtes), 70 000-50 000 frs Cfa (boîtes moyennes), et 30 000-20 000 frs Cfa (petites boîtes). Enfin, on a les serveuses. Dans les grandes boîtes, ces dernières peuvent percevoir entre 70 000 et 50 000 frs Cfa le mois, tandis que les collègues des autres boites touchent entre 50 000-40 000frs Cfa (boîtes moyennes) et 30 000-20 000 frs Cfa (petites boîtes). Vous voyez un peu à quoi ressemblent les salaires dans ces lieux. Et vous êtes conscients ce que la vie est très chère à Douala. Pour moi, les citoyens font de la magie pour survivre au quotidien.

Joseph Roland Djotié | Mercredi 27 Octobre 2010| Camerounlink.net