Dans d’autres pays où la justice fonctionne presque normalement, les services de police et de la brigade financière auraient tour à tour ouvert une enquête pour savoir pourquoi et comment un ministre en fonction se retouve avec autant d’argent à la maison. Pourquoi avons-nous des banques? Etait-ce son épargne? Préparait t-il une mission? Avec les temps qui courent, Mama Fouda ferait mieux de nous dire d’où lui vient cette somme d’argent qui ne pouvait pas être dans un compte bancaire de Yaoundé. En tout cas, lisez seulement.
Le jardinier, le cuisinier et l’agent de ménage du ministre de la Santé publique ont été libérés après 10 jours de garde à vue. Un accident de train survenu en 2009 a permis à ces employés de découvrir que leur patron garde toujours beaucoup d’argent à la maison.
Contacté lundi 4 juin 2012 par «Repères», le ministre de la Santé publique (Minsanté) a opté pour le silence. Peut-être que M. André Mama Fouda est surpris que la presse se saisisse de cette affaire gênante. Une histoire de vol à répétition dans sa résidence du quartier Obobogo à Yaoundé. Bien que le Minsanté veuille, d’après des sources proches de l’enquête, entretenir le plus grand mystère autour du montant cumulé soutiré, l’on a pu apprendre qu’il s’agit de… 300 millions de FCFA.
Selon des sources policières, c’est le 14 mai que l’ancien directeur de la Maetur fait déposer une plainte au commissariat central numéro 3 de Yaoundé contre trois de ses personnels domestiques pour vols répétitifs. Le 28 mai, Ernest Ndzié le cuisinier, Audrey Moukolo le jardinier et Jean Letni l’agent de ménage ainsi que son épouse qui ne travaille pourtant pas chez le Minsanté, sont gardés à vue.
D’après le quotidien «Le Jour» dans son édition du 5 juin, pendant l’enquête une perquisition au domicile du couple Letni a permis de saisir un carnet de compte d’épargne au nom de Mme Letni qui a reçu une provision d’environ 22 millions de FCFA entre 2010 et 2012. En plus, des objets disparus chez le Minsanté ont été retrouvés dans le domicile de l’un des employés.
En dépit de multiples sévices corporels subis qui ont laissé des marques chez certains, les gardés à vue ont résisté aux tentatives du ministre de récupérer quelques biens leur appartenant. Si M. Mama Fouda a récupéré un véhicule acquis avec l’argent volé et une importante somme d’argent, un employé a refusé de céder ses deux maisons. Malgré cette résistance, le Minsanté a fait libérer ses employés le 6 juin, en offrant en plus à M. Letni considéré comme le premier suspect du fait qu’il détenait le double de la clé de la chambre de son patron, de reprendre du service.
D’après notre enquête, c’est un accident qui a éveillé l’attention et aiguisé l’appétit du personnel domestique du Minsanté. Le 28 août 2009, un train transportant du gasoil, du pétrole et du super dans 15 wagons déraille au passage à niveau au quartier Obobogo à Yaoundé, provoquant un violent incendie. Les flammes menacent la résidence de M. Mama Fouda, située dans les parages, qui rapplique dare-dare chez lui pour coordonner la sécurisation de l’impressionnant parc automobile dans tous les garages alentour.
Le personnel découvre alors, ahuri, que parmi les autres effets sécurisés, il y a beaucoup de sacs d’argent transférés dans un lieu sûr. «Je n’avais jamais su ou imaginé qu’il y avait autant d’argent dans cette maison», souffle un témoin oculaire. A en croire une source, c’est depuis ce temps que le personnel domestique s’est mis à se servir.
Cette affaire met en lumière un phénomène qui prend de l’ampleur: les personnalités préfèrent désormais conserver leur argent dans des coffres-forts dans leurs résidences. Contrairement à M. Mama Fouda ou M. Tsimi Evouna, la plupart des hauts responsables victimes de vol d’espèces sonnantes et trébuchantes préfèrent souvent garder le silence, de peur d’ébruiter l’affaire. Et de se mettre dans le viseur de l’Anif.
Dominique Mbassi| 15 Juin 2012 | Reperes
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