Golden sounds : Aux sources du titre Zangalewa

Comment une complainte de tirailleurs est devenu une chanson à succès.

Quand on écoute « Zangalewa » interprété par les Golden Sounds, on pense à une chanson de charge, à un hymne guerrier. Zangalewa est une complainte de tirailleurs, la lamentation d’une recrue dans les troupes coloniales, qui se plaint de l’âpreté des manœuvres militaires alors qu’il pensait être un privilégié.

«Qui t’a appelé ?», lui rétorquent en « mongo ewondo » des militaires plus aguerris. Le m «mongo ewondo» est un pidgin de langues Betis, alors en vigueur chez les tirailleurs de l’armée coloniale française. Une armée à l’époque constituée en majorité, à l’exception des encadreurs français, d’illettrés et provenant de l’Afrique Equatoriale française qui regroupait le tchad, l’Oubangui Chari, le Gabon, le Congo, auquel on associait le Cameroun sous administration française, ainsi que de l’Afrique occidentale française.

Ces recrues venues d’horizons et de cultures diverses se retrouvaient, selon le témoignage d’un officier à la retraite, à l’Ecole des cadets de Brazzaville, la capitale de l’Afrique Equatoriale française et, plus tard, de la France libre. Notre source situent ces faits dans les années 1930

La langue principale des troupes coloniales est alors le Bambara du Mali. Les élèves, pour se comprendre, vont se fabriquer une manière de langue comprise de tous. Le moyen le plus efficace imaginé à cette fin alors, va être la chanson. Les élèves venus du Cameroun auraient alors composer «Zangalewa» . La chanson est vite adopté, le «mongo ewondo » étant facile à comprendre. L’adhésion est grande. On se passe la mélodie. On se l’approprie. Chacun en fonction de son origine, de sa culture et de son obédience religieuse, y accole des paroles qui lui conviennent. Les cadets, après les six mois que durait leur formation quittent Brazzaville. La chanson et ses nuances sont ainsi chantées dans les confins de l’empire colonial.

En 1985, un groupe de quatre militaires férus de musique va se constituer à Yaoundé. C’est l’époque où la chanson à succès de « Ancien combattant » du musicien congolais Zao fait un tabac. C’est dans l’air du temps. Ze Bella, Doh Bele et leur eux comparses réunis au sein des Golden Sounds, vont se dire : «Pourquoi pas nous » ? Les Zangalewa sont nés, avec Claude Tchemeni, alis «Cloclo» pour producteur. Leur principal génie va être de faire comme leurs aieux. Ils recomposent à leur façon la chanson du tirailleur peureux. Ils y ajoutent des paroles de leur époque. Racontent les difficultés de la manœuvre militaire. Soulignent «le sadisme de Massa Ngallé, gendarme à la retraite», « les froides baignades dans la rivière Soum Soum où on baptisait les recrues à minuit ou aux aurores», font l’éloge d’un officier général réputé proche de ses troupes «Moustache est un exemple très populaire dans les troupes» souligne Ze Bella leader des Zangalewa.

Pour autant la complainte du tirailleur n’a de cesse d’évoluer. Après avoir été hymne de la coupe du monde de football 2010, en Afrique du sud, les anciens Golden Sounds préparent pour la célébration de leur 25ème anniversaire, une version rafraîchie de la chanson. «Nous allons refaire la chanson, la rendre plus moderne et plus courte, faire en sorte de convenir aux canons des grands producteurs avec qui nous allons travailler», annonce Ze Bella.

Aziz Salatou |Lundi, 26 Juillet 2010|Le Jour|