Les derniers jours de Pius Njawe

Par lemessager | Mardi 20 juillet 2010 | Le Messager

La veille de la Convention organisée le 10 juillet dernier à Washington (USA) par la CAMDIAC (Cameroon diaspora for change – « Diaspora camerounaise pour le changement ») au Crown hotel Plaza, ses membres ont tenu à faire le point sur les participations. On apprend alors que Ni John Fru Ndi, le leader du SDF, a décliné l’invitation. Germaine Ahidjo, l’ex-première dame du Cameroun, qui doit mettre à jour ses papiers avant de songer à tout déplacement, n’a pas pu venir. Mboua Massock avait confirmé sa participation et était attendu samedi matin en provenance de Douala.

Quant à Ndam Njoya, Hameni Bieleu, Guerandi Mbara, Pius N. Njawé et le représentant de Christopher Fomunyoh, ils étaient déjà sur les lieux de l’événement le 9 juillet. Dans la soirée, ils prennent d’ailleurs part, dans la salle des conférences de l’hôtel Crown plaza où ils sont logés, à une réunion de prise de contact. « L’ambiance était si bonne, si chaleureuse que personne ne voulait aller se coucher. Il a fallu l’insistance du personnel de l’hôtel pour que nous consentions enfin à nous séparer », affirme Howard Njeck, le vice-président de la Camdiac.

Lettre à la diaspora

Le lendemain 10 juillet, Pius N. Njawé fait photocopier sa lettre à la diaspora écrite en 2001 et rééditée la veille par Le Messager. Il tient à ce que chacun des participants (évalués à environ 350) ait une copie avant de traverser le seuil de la salle des travaux. Et lorsque son tour de monter sur le podium arrive, après le passage des leaders politiques, Pius N. Njawé, dont le propos va durer environ trente minutes, saluera l’initiative de la CAMDIAC de rassembler les forces de la diaspora pour contribuer au changement au Cameroun. Il était d’autant plus heureux que cette initiative reprenait en écho sa fameuse lettre à la diaspora. Il a naturellement profité de cette tribune pour évoquer les problèmes de la presse et lancer un appel pour le soutien du journal Le Messager en proie, depuis quelques temps, à des difficultés. « Pius Njawé fut très applaudi pendant et après son intervention », se souvient, ému, Dr. Ade Peter, arrivé du Texas.

Initialement, les travaux de la Convention doivent prendre fin à 18 heures. Mais c’est plutôt aux environs de 21 heures qu’intervient la clôture. Après une journée ardue, les organisateurs remettent au jour suivant l’établissement de la déclaration finale de ce rendez-vous. Et c’est dans l’après-midi de ce dimanche 11 juillet que le document est finalisé. Célestin Bedzigui et d’autres têtes peuvent prendre quartier libre, même si tous les participants n’y ont pas encore apposé leur signature. Adamou Ndam Njoya, demeuré dans sa suite présidentielle de l’hôtel Crown plaza, a été le dernier à le faire lundi 12 juillet, alors que presque tous les organisateurs et intervenants ont déjà déserté les lieux.

D’ailleurs, Pius N. Njawé, débarqué du même avion que le président de l’UDC dans la soirée du vendredi 9 juillet en provenance de Paris (France), est à bord d’une voiture lancée sur l’autoroute reliant les Etats américains du Maryland et de la Virginie. Il allait rendre visite à sa fille Justice, la toute dernière de sa défunte épouse Jane et qui vit depuis des années en Virginie chez des proches parents du fondateur du Messager.

Le voyage de Virginie était prévu le 11 juillet…

Le père avait souhaité aller à la rencontre de sa fille un jour plus tôt. C’est-à-dire dimanche 11 juillet, après la rédaction de la déclaration finale de la convention de la CAMDIAC , à laquelle Pius N. Njawé avait pris une part active. Mais, d’après certains témoignages, son agenda a dû être modifié à la demande de sa famille de Virginie, qui ne souhaite faire aucune déclaration pour l’instant. Jean Bosco Tagne, directeur des programmes et actions de la CAMDIAC résidant à Boston, explique notamment que Pius N. Njawé avait prévenu par téléphone les siens de son arrivée en précisant qu’il allait emprunter le train, comme il en a souvent l’habitude. « Compte tenu du fait qu’il se faisait déjà tard, on l’a rappelé pour lui dire de ne pas bouger, que quelqu’un sera dépêché le lendemain, au volant d’une voiture pour le chercher », révèle Jean Bosco Tagne.

Et ce lundi 12 juillet, après avoir déjeuné au domicile de Jean Bosco Tagne, en compagnie de certains autres participants et organisateurs de la Convention qu’il a interviewés et pris en images à l’aide d’une camera, Pius N. Njawé prend place à bord de la Lexus grise arrivée de Virginie. Pendant les adieux, il assure que Le Messager fera son devoir d’information, en rendant largement compte des travaux de la Convention de la diaspora tenue à Washington le 10 juillet 2010. Dans cette perspective, Jean Bosco Tagne avait pris la direction de la Virginie où il devait retrouver Pius N. Njawé pour lui remettre la Déclaration finale que Ndam Njoya venait de signer.

Mais le directeur du Messager n’est jamais arrivé à destination. A une dizaine de minutes de la maison où Justice attendait impatiemment son papa, le drame s’est produit. Pius N. Njawé est mort dans un accident de voiture dont le rapport d’enquête n’a toujours pas été publié. D’après plusieurs personnes auxquelles il s’était confié lors de la Convention de Washington, dès son retour au pays, il se proposait d’organiser une marche de Douala à Yaoundé pour sensibiliser les usagers sur la sécurité routière. Des actions d’éducation citoyenne portant sur le respect du code de la route étaient ainsi prévues sur l’axe lourd où son épouse Jane a été mortellement fauchée en 2002…

Avant de débarquer au Cameroun, Pius N. Njawé avait prévu de faire une escale en France, où il avait déjà passé quelques jours aux côtés de deux de ses enfants. Le destin en a décidé autrement. Cruellement…

Célestin Ngoa Balla

À New York