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Michaël Ngako Tomdio : « Il faut éviter de faire une comparaison aveugle entre les coûts des projets »

Le ministre de l’Energie et de l’Eau donne les objectifs du Programme thermique d’urgence et revient sur la supposée surenchère.

Qu’est ce qui justifie la mise en place d’un programme thermique d’urgence par votre département ministériel ?

Je voudrais tout d’abord remercier le Journal le Jour pour l’intérêt qu’il porte au secteur de l’énergie, qui est un secteur vital pour l’économie camerounaise.
Pour répondre à votre question, il est bon de savoir que, présentement, le secteur de l’électricité camerounais dispose d’une marge de sécurité quasiment nulle en capacité de production, ce qui est risquant au vu de la structure du parc de production particulièrement vulnérable à l’aléa pluviométrique (76% de la production provenant de l’hydroélectricité, 5% d’origine thermique, 19% d’autoproduction).

Compte tenu du besoin croissant en électricité et du retard dans la mise en place des nouveaux projets, le gouvernement a estimé qu’une des principales options pour accroître la production d’électricité était la mise en service rapide des centrales thermiques fonctionnant au fuel pour éviter des délestages pénalisants pour l’économie et les ménages.

Ces groupes électrogènes seront installés dans quelles villes et qu’est ce qui justifie le choix de ces villes ?

Ces groupes électrogènes seront installés dans les villes de Mbalmayo, Ebolowa, Bamenda et Yaoundé. Le choix de ces villes est justifié par la précarité de la qualité du service du fait de leur localisation géographique pour les trois premières citées, et sa position stratégique pour ce qui est de Yaoundé qui est la capitale du Cameroun dont la sécurité d’approvisionnement électrique ne doit souffrir d’aucune lacune.

Ce programme thermique d’urgence, d’après nos informations coûtera à l’Etat camerounais environ 100 Milliards de francs Cfa, soft 36 Milliards de francs Cfa pour le projet Elsewedy (pour 40 mégawatts) et 86 Milliards de francs Cfa pour Sojitz-Empower (pour 60 mégawatts). En Côte d’Ivoire, une centrale thermique d’une capacité de 70 mégawatts a été louée pour deux ans à 22,5 milliards de francs Cfa. Qu’est-ce qui justifie la surenchère pour ce qui concerne le cas du Cameroun ?

Je tiens tout d’abord à préciser qu’au bout des négociations, le gouvernement n’est pas parvenu à s’entendre avec le groupement Sojitz-Empower, dont l’offre financière a été jugée élevée. Il n’est donc pas question pour le gouvernement de réaliser avec ce groupement un projet de 86 Milliards de francs Cfa comme affirmée.
En revanche, après avoir arrêté les discussions avec Sojitz-Empower, le gouvernement a réengagé auprès des professionnels du métier un processus large de consultation qui l’a conduit à retenir la société Aggreko, qui est spécialisée dans la fourniture d’énergie temporaire et dont l’offre technique et financière s’est avérée la plus attrayante et la moins-disante. Les négociations ont été entamées avec cette société pour la location pour une durée de deux (02) ans des groupes électrogènes d’une capacité de 60 MW au Gouvernement.

Selon la proposition faite par Aggreko, en considérant l’option location simple d’équipements, hors coûts d’exploitation, l’Etat aurait à débourser sur deux ans la somme de 22 427 235 050 FCFA. Ce qui est sensiblement le même montant que le projet réalisé en Côte d’ivoire.

Il faut cependant éviter de faire une comparaison aveugle entre les coûts des projets sans connaître de quoi sont formés ces coûts. Le contrat signé entre la société Aggreko et la compagnie d’électricité nationale de Côte d’Ivoire porte sur la fourniture de 70 MW (mégawatts) d’énergie temporaire fonctionnant au gaz naturel, alors qu’au Cameroun, il s’agît de machines fonctionnant au fuel léger.
Deuxièmement, le matériel loué par Aggreko en Côte d’Ivoire va alimenter une seule centrale, la centrale thermique d’Azito. Dans le cas du Cameroun, en raison des contraintes du système électrique, il est prévu que les équipements soient installés sur deux sites séparés, à savoir le poste de Mbalmayo et le poste d’Ahala à Yaoundé. Ce qui ajoute des coûts de mobilisation et de démobilisation.

Comment la société égyptienne Elsewedy et la société japonaise Sojitz-Empower ont-elles été choisies pour exécuter ce programme thermique d’urgence?

Comme je vous l’ai dit plus haut, le gouvernement n’a pas choisi le groupement Sojitz-Empower. S’agissant de la société égyptienne Elsewedy et de la société Aggreko, celles-ci ont été retenues après une large consultation des professionnels du métier.

La centrale thermique au fioul lourd de Yassa (86 MW), qui a été inaugurée en décembre 2009, a été construite par la Kribi Power Development Company (Kpdc) en 19 mois, à hauteur de 62,8 milliards de francs Cfa. Au lieu de louer une centrale thermique, le gouvernement ne peut-il pas financer la construction des centrales thermiques, qui vont lui appartenir ?

Le contrat de services signé entre le Gouvernement et la société ELSEWEDY porte sur la livraison clés en main d’équipements qui seront bel et bien la propriété de l’Etat du Cameroun. Pour ce qui est du contrât en cours de négociation avec la société AGGREKO, les discussions engagées concernent la location mais prévoit une option de vente, à la fin de la période de location. Dans le cas de l’option location-vente, le coût du projet reviendrait à 39 390 735 050 FCFA pour installer, louer et acquérir les 60 MW sur les deux sites.

Beaugas-Orain Djoyum|Vendredi, 30 Juillet 2010|Le Jour|