Enseignement supérieur: Controverse autour des diplômes du BTS

Bts : Des diplômes sécurisés à tête chercheuse

Le Minesup a délivré des parchemins lundi à des lauréats de l’Institut Siantou supérieur pendant que ceux d’autres écoles en réclament.

L’amphithéâtre 800 du complexe universitaire Siantou a bourdonné de cris de joie lundi après-midi. Le ministre de l’Enseignement supérieur Jacques Fame Ndongo, y a présidé la cérémonie de remise des tout premiers diplômes du brevet de techniciens supérieurs (Bts) «sécurisés et infalsifiables», du Higher national diploma (Hnd), l’équivalent du Bts dans le système anglophone, et du diplôme supérieur d’études professionnelles (Dsep), session 2009. Les lauréats à ces différents examens se contentaient jusqu’alors des attestations de réussite ou des diplômes signés des chefs d’instituts privés d’Enseignement supérieur. Aux côtés de Jacques Fame Ndongo, l’on a retrouvé pour l’occasion le ministre de la Communication Issa Tchiroma Bakary, le ministre du Tourisme Baba Hamadou, le recteur de l’Université de Yaoundé I Oumarou Bouba et le vice-chancellor de l’Université de Buéa Vincent Titanji, entre autres. 160 «majors» faisaient partie de cette cuvée de récipiendaires, même si, seuls quelques meilleurs ont reçu leurs parchemins des mains des personnalités ayant honoré l’évènement de leur présence.

La mine enjouée, le ministre de l’Enseignement supérieur a fait «convoquer» cameramen et photographes au moment de remettre le premier Bts «sécurisé et infalsifiable» à une lauréate de la spécialité Tourisme. Dans une énumération enflammée, le Minesup, affublé pour la circonstance du titre de «grand chancelier des ordres académiques» va, vers la fin de son allocution, dérouler les actions menées ou en vue que le promoteur du complexe universitaire Siantou annonce : dans le domaine des structures et des infrastructures, il cite : le «palais étoile», le bâtiment à cinq niveaux abritant les salles de cours et les bureaux, les laboratoires et la bibliothèque. Bien avant, le président général du complexe universitaire Siantou, Lucien Wantou Siantou tentait de justifier le choix de son école pour cette cérémonie «historique» : «Seulement pour la cuvée 2009, 163 étudiants du complexe universitaire Siantou ont réussi avec brio leur examen de Bts, Hnd et Dsep avec au moins une moyenne de 12/20, ce qui correspond à la mention assez bien au plus bas mot (…)», déclarera-t-il. Parmi les promoteurs des autres institutions privées de l’Enseignement supérieur (Ipes), l’on tombe pratiquement des nues à l’évocation de l’objet de la cérémonie de lundi. Joseph Ndi Samba, président directeur général du groupe éponyme et président de l’Association des promoteurs des Ipes indique, abasourdi, qu’il «n’a jamais pris part à une réunion préparatoire à la remise des diplômes du Bts. C’est vous qui m’apprenez qu’une telle cérémonie a eu lieu. Les lauréats de Ndi Samba n’ont pas, de toute façon reçu de diplômes. Je vais me rapprocher du ministre de l’Enseignement supérieur…».

Crédibilité

Louis Marie Djambou, le président directeur général de l’Ecole supérieure de gestion (Esg) basée à Douala, de son côté, réagit : «C’est une bonne initiative. J’ai appris cela par une rumeur. Maintenant, j’estime que c’est la proximité géographique de l’Institut Siantou avec le ministère de l’Enseignement supérieur qui a fait qu’on commence à Yaoundé. J’estime que la remise des diplômes du Bts ne doit pas être sélective. J’accueillerai très favorablement le ministre (Fame Ndongo) le 1er octobre prochain pour la «Fête des Lauréats que Esg organise afin de primer ses meilleurs étudiants».
Des sources internes à la cellule de communication du Minesup soutiennent par ailleurs, à propos de la cérémonie de lundi dernier, qu’ «il s’agissait simplement de la première étape de la remise des diplômes de Bts. Cela va s’étendre à d’autres institutions privées de l’Enseignement supérieur.

L’Institut Siantou nous a fait parvenir tous ses résultats dans les délais. La remise des diplômes est une option irréversible. Elle participe autant dans les universités publiques que privées de la nouvelle dynamique impulsée par le Pr. Jacques Fame Ndongo», croit savoir notre source. Une argumentation que relativise Louis Marie Djambou qui estime que «le Bts étant un examen d’Etat, le fichier des résultats se trouve au Minesup et non dans les centres d’examen, moins encore à la disposition des établissements qui assurent seulement la formation. C’est le Minesup qui proclame les résultats, ce ne sont pas les centres d’examen», fulmine-t-il. Un autre universitaire approché, s’inquiète pour sa part, de la «discrimination» dont se rendrait coupable le Minesup à l’égard des autres Ipes. Il cite la présence fréquente du ministre à la «Fête des Majors» de l’Institut Sinatou, alors qu’ailleurs, lorsqu’il est invité, il se fait représenter. Toutes choses qui ôteraient, d’après l’enseignant, toute «crédibilité et impartialité» au Minesup.

Georges Alain Boyomo|25 aout 2010 |Mutations|